On m'a fait promettre une review en bonne et due forme pour cet événement, alors la voici la voilà, pendant que le concert est encore frais dans ma tête.
En revanche, et ça me désole un peu de devoir consacrer quelques lignes à ça, mais je suis obligé d'évacuer d'emblée le seul point fâcheux de la soirée : je crois pouvoir dire qu'il s'agit du public le plus foireux et déprimant qu'il m'ait été donné de côtoyer. Quoique ça semblait beaucoup plus sympa' en fosse, et j'ai vite regretté d'avoir opté pour une place en balcon. Pour vous la faire courte, quand Macca est arrivé sur scène, j'ai eu l'idée complètement folle de me lever. Ça a valu au mec derrière moi de me taper sur l'épaule, et de me lancer avec la grâce d'une serpillière martyrisée un lendemain de cuite, un vibrant "Oh, tu vois pas assez clair ?" ... Voilà pour l'esprit. Interdiction de se lever. J'ai pas insisté, parce que très franchement, il était bon pour tâter de mon coup de boule s'il m'adressait encore un demi-mot de travers. Et j'étais pas vraiment venu pour ça.
Je précise au passage qu'il y a au moins un mètre de différence de hauteur entre chaque rangée, et que qui plus est, il n'y avait personne pile derrière moi. Autrement dit, je ne devais même pas gêner la vue de qui que ce soit. Mais non : tout le monde le cul vissé sur sa chaise, et le gars à ma droite a passé
tout le concert à filmer pour un rendu probablement minable avec son téléphone, le regard perdu sur son écran tactile. Wouhou, Rock'&'Roll !
J'aurai bien aperçu quelques courageux pas trop loin oser se lâcher un peu quand c'était le feu sur scène, mais concrètement, pas mal auraient pu venir en pantoufles et avec un bol de soupe. On était deux à chanter dans un périmètre de 40 personnes... Même le final de "Hey Jude", j'étais le seul sur 3 rangées à donner de la voix, requête de Macca himself. Bref, tristesse. Et j'en ai rien à foutre des ovations, des applaudissements nourris etc. Ce n'est pas ce qui fait une bonne ambiance, ça existe même chez Lorie ça.
Désolé pour cette entrée en matière un peu ronchonne, mais ça m'a sincèrement gâché la fête. Je me suis senti prisonnier de ma chaise.
Heureusement, il y a avait un papy de presque 70 piges beaucoup moins coincé sur scène. Un grand gamin enthousiaste, pétillant, débordant d'énergie, impressionnant de présence et de générosité, qui a joué pas moins de 37 titres, pour près de 3 heures de concert. Une vraie leçon. Ceux qui ont aperçu les Rolling Stones chancelants il y a quelques années, avec un Keith Richards au bout du rouleau, savent ce qu'il peut y avoir de triste à vouloir ressusciter des légendes qui ne sont plus que des épaves. Paul McCartney, même s'il est fatalement surtout là pour honorer son passé, n'effleure jamais le pathétique. C'est même tout le contraire. Moi, il me fait rêver ce mec. Ne pas faire son âge à ce point, c'en est presque indécent.
Hello Goodbye
Junior's Farm
All My Loving
Jet
Drive My Car
Sing the Changes
The Night before
Let Me Roll It
Paperback Writer
The Long and Winding Road
Come and Get It
1985
Maybe I'm Amazed
San Francisco Bay Blues
I've Just Seen a Face
I Will
Blackbird
Here Today
Dance Tonight
Michelle
Mrs Vanderbilt
Eleanor Rigby
Something
Band on the Run
Obladi Oblada
Back in the USSR
I've Got a Feeling
A Day in the Life / Give Peace a Chance
Let It Be
Live and Let Die
Hey Jude
The Word / All You Need is Love
Day Tripper
Get Back
Yesterday
Helter Skelter
Golden Slumbers / Carry That Weight / The EndVoilà, ça c'est pour ceux qui l'imaginaient venir avec une canne, une guitare acoustique, en chantonnant gentiment des balades pour faire illusion. Non. Le mec met le bleu de chauffe, ne s'épargne absolument rien, et balance un show qui semble défiler à la vitesse de la lumière. Sa voix, juste un brin plus fragile qu'il y a 30 ans, s’accommode sans problème de ses morceaux les plus exigeants ("Maybe I'm Amazed", "live & Let Die" ou "Helter Skelter"), et possède toujours ce grain qui la rend unique. Mais il ne faut pas s'y tromper, il est loin d'être plus simple de captiver tout Bercy lorsqu'il y va d'un guitare/voix épuré au possible pour exécuter sans filet une version magique de "Blackbird". Un grand moment intimiste... Dans la plus grande salle de France. Pas de problème.
Bon, personnellement, j'aurais volontiers remplacé "Obladi Oblada" par le morceau de mon choix, et je me serais épargné le medley avec "Give Peace A Chance" (comme dirait un ami à moi, "Les medleys, c'est pour Émile & Images"), mais le Setlist - sur lequel j'avais tenu à ne pas me rencarder, histoire de ne pas me griller d'éventuelles surprises - m'a globalement comblé. Les incontournables des Wings sont là, il s'est risqué à deux ou trois incartades inattendues ("Junior's Farm", "Sing the Changes" ou la cover de "San Francisco Bay Blues", écrite par Jesse Fuller), et y est même allé d'une de mes chouchoutes avec "Here Today". Un hommage à Lennon tout en retenue, sans surjouer la fibre émotionnelle.
Moi qui ai pu dire par le passé que "Les Beatles par Paul McCartney et son orchestre", ça me posait problème en termes de légitimité et d'authenticité, que ça pouvait m’apparaître comme une contrefaçon des Beatles, je témoignerai juste du fait que lorsque résonnent "Get Back" ou "Eleanor Rigby", on marche tout droit. Quant au final, à savoir l'enchaînement mythique contenu dans "Abbey Road" via "Carry That Weight", c'est tout simplement pour ce qui me concerne ce que la discographie des Beatles contient de plus fabuleux. Impossible de finir sur une meilleure note.
M'enfin voilà, j'ai vu un Beatles sur scène. J'ai craint ne jamais pouvoir dire ça. Mieux que ça, j'ai vu un Beatles qui n'a pas manqué de faire honneur à une carrière solo sous-estimée.
Et au passage, Macca prévoit la sortie de deux nouveaux disques en 2012. Un album volontairement nostalgique et suranné, en hommage à la musique qu'écoutaient ses parents, et un disque plus pop qu'il dit potentiellement "psychédélique"... Étant donné que, loin de s'endormir sur ses lauriers de légende de la musique populaire, ses efforts solos post-2000 recèlent quelques bijoux - j'ai d'ailleurs un peu regretté qu'il ignore "Chaos And Creation In The Backyard" - ça méritera évidemment d'être suivi.