par Yoan » Jeu 17 Nov 2011 11:40
J’ai choisi d’en parler justement parce que je trouvais cette vidéo particulièrement piégeuse et efficace. Personnellement, je n’ai commencé à trouver ça louche que lorsque le discours a pris des proportions politiques et idéologiques. Le ressort émotionnel n’est pas nouveau, et il n’est même pas tant critiquable en soi lorsqu’il s’agit de faire valoir « sa » propre cause. J’aurais en effet tout à fait pu entendre ce genre d’initiative pour soutenir et honorer la mémoire d’un fils. C’est d’ailleurs à peu près comme ça que ça commence. Mais par la suite, c’est la Justice dans sa globalité qui est attaquée. Dans son fonctionnement, ses institutions, sa finalité même. Et le très long billet critique lié ci-dessus reprend point par point tout ce qui dans cette vidéo relève de la manipulation, et substitue aux faits et aux preuves des arguments d’autorité non étayés, et autres procédés de culpabilisation pervers. Le mec peut dire « La justice n’est pas du côté des victimes » sans autre légitimité que sa propre peine, et son passé dans la police, ça passe comme une lettre à la Poste, parce qu’on a étouffé le sens critique de l’auditeur sous le poids de l’empathie. Le procédé est dangereux, et relève à mon sens clairement de la propagande idéologique. D’ailleurs, et sans surprise, la vidéo est reprise sur pas mal de sites douteux qui lui font suivre des discours de Marine Le Pen.
Mais le « succès » de cette vidéo m’a fait m’interroger sur mes propres idées et idéaux. Déjà, il me faut avoir l’honnêteté de garder la même distance vis-à-vis de ce qui va plus volontiers dans mon sens, et c’est pour cette raison que j’essaie de rester critique face aux vidéos à la mode telles que « Comprendre la dette en 10 minutes » (ou un truc comme ça), pour ne jamais brader ma raison au profit de la passion, même si les deux doivent nécessairement s’articuler. Et surtout, alors que je réclame toujours à corps et à cri plus de démocratie, je me demande ce qui se passerait si on organisait un référendum sur la peine de mort. C’est un scénario de science-fiction, puisque cela supposerait une sortie de l’Union Européenne, mais admettons. Pas sûr que le résultat me plairait, alors qu’il relèverait pourtant du principe démocratique de base : celui qui fait que la majorité a toujours raison. D’ailleurs, il me semble que la peine de mort a été abolie en France contre la volonté populaire, et je dois admettre que la pratique ne m’a jamais choqué. Pourtant, elle peut être questionnée, et si je suis content qu’un mec comme Badinter ait eu les couilles de faire ce qu’il a fait, je me dis qu’il est encore un échec possible : son discours, aussi célèbre soit-il, a-t-il convaincu le peuple sur la durée ? J’aimerais répondre « oui », mais la vérité, c’est que je n’en sais rien du tout, et que les raisons d’en douter sont nombreuses.