par Yoan » Mar 18 Oct 2011 01:17
Quand je parlais de "véracité absolue", je me suis mal fait comprendre : je voulais juste dire que ça ne recelait aucune intention consciente de mentir ou de romancer son histoire. La sincérité du narrateur a d'ailleurs été mise en cause dans ce cas précis. Personnellement, je n'en juge évidemment pas, mais je comprends qu'on puisse se poser la question.
Après, et c'est ce que voulait suggérer mon interrogation finale, je ne pense effectivement pas qu'en qualité de victime, on puisse offrir autre chose qu'un témoignage en forme de point de vue. Or, un point de vue n'est jamais neutre, par définition. Mais malgré tout, le livre se veut n'exposer que des faits. Des ressentis également, mais rien qui s'écarte du : "Je montre, je décris, je témoigne". Et c'est cette position que j'interrogeais, celle qui consiste à dire "Je vais vous décrire mon calvaire, à vous d'en conclure ce que vous voulez". Certains films ont suscité la polémique exactement pour cette raison, parce que le réalisateur refusait de prendre parti ou de tenter une explication. Pour certains critiques, le procédé est facile et lâche, pour d'autres il est plutôt humble et intelligent.
Alors la comparaison a ses limites, parce que raconter sa propre histoire est un exercice très différent, mais ça n'a pas de prétention autre que d'être un récit malgré tout.
Après, ce que je disais aussi, c'est que "croiser" les données n'empêchera pas que certains livres théoriques sur la maltraitance, la maladie mentale ou que sais-je, suscitent parfois les vives critiques de gens qui ne sont pas d'accord. Les chercheurs en sciences humaines ne tirent évidemment pas tous toujours dans le même sens. Ça n'a rien de négatif pour moi, je trouve ça au contraire très normal, parce que c'est une façon d'avancer. Mais un "essai", je trouve que ça veut bien dire ce que ça veut dire, et je ne pointais là que des différences de nature. Quoiqu'il en soit, une analyse délivre des observations, des conclusions etc. Un témoignage s'en dispense.
Ça n'empêche pas qu'on est je pense d'accord. Mais ce qui me semble étrange, c'est que j'ai l'impression que le film-témoignage qui ne fait "que" raconter une histoire a meilleure presse que le livre qui fera la même chose. "La Guerre Est Déclarée" cartonne d'ailleurs en ce moment au ciné', et j'imagine tout à fait une adaptation du livre qu'a lu Auré pour le grand écran, sans qu'on se pose la question de sa légitimité. Peut-être parce que le livre est encore beaucoup vu comme un objet de savoir, alors que le cinéma, c'est de l'Art, même quand il est autobiographique.